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roumanie - Page 5

  • Une année particulière

    Roman, francophone, Roumanie, Irina Teodorescu, Flammarion, Jean-Pierre LongreIrina Teodorescu, Ni poète ni animal, Flammarion, 2019

    Carmen I., la narratrice, est née en 1979, comme Irina Teodorescu. Comme elle, elle avait dix ans lors de la fameuse « révolution » qui a chassé et liquidé le couple de tyrans qui verrouillait le pays. Maintenant avocate à Paris, Carmen apprend la mort de celui qu’elle appelait le « Grand Poète », ou « Ma Terre », qui l’appelait « Ma Fugue » et jouait un grand rôle non seulement dans sa vie à elle, mais aussi dans celle de la Roumanie, puisque, journaliste et dissident politique, il tenait une place non négligeable dans le pays nouvellement débarrassé des Ceauşescu (surtout de cette « présidente qui avait fait de son mari un homme dépendant. »).

    Alors elle se souvient de l’époque où elle était la « Petite Xénoppe » de sa mère, et son récit déroule les événements qui vont de mars 1989 à février 1990, en prenant appui sur trois générations de femmes : Dani, la grand-mère, que l’on connaît par les « notes informatives » de l’hôpital psychiatrique où elle est périodiquement suivie et interrogée ; Ema, ou Em, la mère, qui se confie régulièrement à des K7 qu’elle enregistre à l’intention d’une amie exilée en Amérique ; et Carmen, donc, qui à dix ans vivait la vie d’une écolière roumaine, séjournait parfois à la montagne, et même écrivait des poèmes dans l’esprit politique du temps, dont l’un à la gloire du Parti, qui « avait remplacé Dieu et était, on nous l’avait assez martelé, notre père à tous » - poème qui lui valut les félicitations de « la camarade maîtresse ». Mais on le sait, la fin de l’année 1989 fut d’une tout autre teneur, avec les événements sanglants que connut le pays – coup d’État ou Révolution, ou moitié-moitié ? Les discussions s’animent entre Carmen et le Grand Poète. « Je lui expliquais alors que les événements de 1989 avaient été à la fois une révolution et un coup d’État, que je le savais grâce à mon point de vue distancié ; que les gens comme lui, j’entendais originaires du même pays, ne pouvaient accepter, tant d’années après, que la révolution avait été en même temps un coup d’État, que les gens comme lui – et comme ma mère, ajoutais-je pour le rassurer – se sentaient dépossédés de leur histoire dès qu’on évoquait cette hypothèse double. ».

    Ni poète ni animal n’est pas un récit historique ou autobiographique. Ces deux aspects y sont certes contenus. Mais c’est avant tout un roman poétique, ou, disons, qui poétise le passé personnel et collectif, sans recourir à l’illusoire linéarité que l’on attribue aux souvenirs. Construction élaborée qui tient compte de la complexité de la mémoire, de ses allées et venues, de la distance qu’elle entretient avec les événements – distance qui n’occulte pas le tragique, mais qui n’exclut pas l’humour, même morbide. Il faut lire par exemple le récit de cette journée de Noël 1989, où le cochon familial fut tué, « nettoyé et découpé », tandis qu’étaient fusillés « la dictatrice et son mari »… D’où la résolution de la fillette : « Avant de m’endormir, je me promis de manger le plus de cochon possible. ». Les bêtes, d’ailleurs, cochon, renard, éléphant et beaucoup d’autres, tiennent une place prépondérante dans le mécanisme de la narration. Et Carmen/Irina, dans le style plein de surprises qui n’appartient qu’à elles deux, de conclure en évoquant « Ma Terre » qui l’incitait à se « repoétiser » : « Je choisis mon camp : ni poète ni animal, mais les deux réunis. ».

    Jean-Pierre Longre

    https://editions.flammarion.com

  • Rencontre avec Marion Le Roy Dagen

    L'association Rhône Roumanie a le plaisir de vous inviter au Kotopo le 27 Septembre 2019 à 20h00 pour une rencontre avec Marion Le Roy Dagen. 

    Rencontre, essai, francophone, Roumanie, Marion Le Roy Dagen, Kotopo, Rhône Roumanie

    14 Rue René Leynaud, 69001 Lyon

    Entrée 4 €

    Sous le gouvernement Ceausescu, la politique nataliste en Roumanie a eu pour conséquence le placement d'enfants dans des institutions. Certains de ces enfants, après avoir été adoptés par des Français, souhaitent explorer des chemins d'enfance pour retrouver la part manquante à leur histoire. Marion Le Roy Dagen a livré son parcours dans L'enfant et le dictateur, paru aux éditions Belfond en 2018. Elle a également cofondé l'Association Française des Orphelins de Roumanie (AFOR).

    Rencontre, essai, francophone, Roumanie, Marion Le Roy Dagen, Kotopo, Rhône Roumanie

     

    Des documents en lien avec cette rencontre :

    - Si les enfants sont choyés lorsqu'ils arrivent au monde, des abandons sont néanmoins une préoccupation aujourd'hui aussi ; des travailleurs sociaux roumains témoignent dans un reportage ARTE.

    - Pour remonter dans l'histoire de l'adoption en Roumanie, un article écrit par une des fondatrices de l'AFOR (Association Française des Orphelins de Roumanie) 

    Que sont devenus les orphelins de l'Europe? Une reportage France 24  (27/06/2018)

    - Adopter, un jeu d'enfants? Arte 4 min

    - Adoption, le choix des nations un film d'Anne Georget Arte France 2015 

    - En France, Itinéraire d'un enfant placé Arte 56 min

    Des lectures proposées par Jean-Pierre Longre explorent le sujet :

    -  Liliana Lazar, Enfants du diable      

    -  Savatie BaştovoiLes Enseignements d'une ex-prostituée à son fils handicapé

    -  Marion Le Roy Dagen, Toujours vers les autres

     

    https://www.facebook.com/Association-Rh%C3%B4ne-Roumanie-682546995220100/?fref=nf

    http://www.kotopo.net

    http://orphelinsderoumanie.org

  • Nouveautés de la rentrée 2019… Chroniques à venir…

    Roman, Poésie, Roumanie, francophone, Mircea Cărtărescu, Laure Hinckel, éditions Noir sur Blanc, Irina Teodorescu, Flammarion, Paul Vinicius, Radu Bata, Jacques André éditeurMircea Cărtărescu, Solénoïde, traduit par Laure Hinckel, éditions Noir sur Blanc, 2019

    Présentation de l’éditeur :  

    Chef-d’œuvre de Mircea Cărtărescu, Solénoïde est un roman monumental où résonnent des échos de Borges, Swift et Kafka. Il s’agit du long journal halluciné d’un homme ayant renoncé à devenir écrivain, mais non à percer le mystère de l’existence.

    Après avoir grandi dans la banlieue d’une ville communiste – Bucarest, qui est à ses yeux le « musée de la mélancolie et de la ruine de toute chose », mais aussi un organisme vivant, coloré, pulsatile –, il est devenu professeur de roumain dans une école de quartier. Si le métier le rebute, c’est pourtant dans cette école terrifiante qu’il fera trois rencontres capitales : celle d’Irina, dont il tombe amoureux, celle d’un mathématicien qui l’initie aux arcanes les plus singuliers de sa discipline, et celle d’une secte mystique, les piquetistes, qui organise des manifestations contre la mort dans les cimetières de la ville.

    À ses yeux, chaque signe, chaque souvenir et chaque rêve est un élément du casse-tête dont la résolution lui fournira un « plan d’évasion », car il ne s’agit que de pouvoir échapper à la « conspiration de la normalité ».

    http://www.leseditionsnoirsurblanc.fr

     

    Roman, Poésie, Roumanie, francophone, Mircea Cărtărescu, Laure Hinckel, éditions Noir sur Blanc, Irina Teodorescu, Flammarion, Paul Vinicius, Radu Bata, Jacques André éditeurIrina Teodorescu, Ni poète ni animal, Flammarion, 2019

    Présentation de l’éditeur :

    Carmen apprend la mort soudaine du Grand Poète, sa seule attache à la Roumanie, au moment où elle traverse un rond-point occupé par un peuple prêt à tout renverser. Alors, elle a comme un éblouissement : les souvenirs d’une autre révolution, conduite par ce poète autrefois dissident, lui reviennent, intacts.
    1989. Elle avait dix ans et écrivait des poèmes à sa « camarade maîtresse» pendant que sa mère, cachée dans la salle de bains, enregistrait des K7 audio à destination d’une amie passée à l’Ouest et que son père échangeait les savons de son usine contre des petits pains. À l’époque, tout cela lui paraissait aussi banal que la folie de sa grand-mère, surveillée depuis toujours par les autorités, ou que les ours des Carpates dont on disait qu’ils mangeaient les enfants.
    De quel genre de vague à l’âme naît une révolution ? Est-ce une impulsion animale ou poétique ? En conteuse aussi insolite qu’inspirée, Irina Teodorescu puise dans les souvenirs vifs de son enfance pour mettre en scène trois générations de femmes - et quelques animaux à leur suite - que rien ne préparait à voir la grande Histoire tout bousculer.

    https://editions.flammarion.com

     

    Roman, Poésie, Roumanie, francophone, Mircea Cărtărescu, Laure Hinckel, éditions Noir sur Blanc, Irina Teodorescu, Flammarion, Paul Vinicius, Radu Bata, Jacques André éditeurPaul Vinicius, la chevelure blanche de l’avalanche, traduit par Radu Bata, Jacques André éditeur, 2019

    Présentation de l’éditeur :

    et tu es tellement tellement belle quand tu dors que j'ai de plus en plus sommeil de toi

    Ce recueil de poèmes choisis brille de mille feux, à l’image de son auteur : entier, vrai, ébloui par la nuit, amoureux comme un soleil noir. Paul Vinicius vit avec la poésie : il sort avec elle, il veille avec elle, il partage avec elle la plus belle étreinte. Il lui boit les mots, il lui panse les blessures, il lui offre sa biographie. Ainsi, souvent, la ligne de démarcation entre Paul Vinicius et la poésie se confond avec l’horizon. Regardez bien : un œil attentif discernera l’ombre de ce grand poète roumain derrière un coucher de soleil. Poète, dramaturge, journaliste et essayiste, Paul Vinicius est diplômé de l’École Polytechnique de Bucarest et docteur ès lettres, la partie visible de son parcours surprenant, car il a exercé de nombreux métiers avant de se dévouer à l’écriture. Champion de boxe, puis karatéka, il a travaillé comme maître-nageur sur la côte de la mer Noire, détective privé, pigiste, correcteur, rédacteur pour la presse nationale et pour la maison d’édition du musée de la Littérature roumaine. Après avoir été interdit de publication en 1987 par la censure communiste, il a renoncé à sa carrière d’ingénieur et son curriculum vitae accompagne les soubresauts de la démocratie survenue en décembre 1989, à la recherche d’un nouveau départ, d’une nouvelle ivresse.

    http://www.jacques-andre-editeur.eu/web

  • « Le persil appelle au travail »

    Le Persil n° 165, juillet 2019

    revue, le persil, francophone, suisse, roumanie, marius daniel popescu, Jean-Pierre LongrePour une fois, en déployant les ailes du Persil (drôle d’image, pourtant appelée par l’envergure des pages de ce journal hors normes), les lecteurs y trouvent uniquement du Marius Daniel Popescu. Et il n’y a pas de quoi se plaindre. Auteur hors normes lui aussi, il nous sert en apéritif et en dessert des souvenirs forestiers, dans lesquels le réalisme et la poésie font bon ménage. Les premiers rappellent des scènes vécues dans la jeunesse : « Tu devais travailler comme tout le monde pour le parti unique, il ne fallait pas devenir un parasite de la société. ». Plus tard, « tu feuillettes les forêts de ta mémoire », qui font remonter maintes images. Car « une forêt est une sorte d’immense jardin qui donne de la vie à la vie ».

    En double plat de résistance, le récit d’une rencontre avec Patrick, un drôle de poète SDF, qui a fui la France pour demander l’asile politique à la Suisse… Et, en séquences alternées, l’histoire d’une « comédienne à la Fabrique de douleurs », qui suit les instructions d’un inconnu : « Racontez-vous à vous-même, dites-vous les histoires qui font la dentelle de vos jours et de vos nuits. » ; ce qui entraîne d’étranges aventures, ainsi que des monologues débridés, des jeux et des danses avec les lettres et les mots : « Femme sous les mots, je respire folie je marche labyrinthe je parle une langue qui parle toutes les langues. Femme au-dessus des mots, je vous emmerde. J’ai appris l’explosion. De mes poumons. De mes neurones. ».

    revue, le persil, francophone, suisse, roumanie, marius daniel popescu, Jean-Pierre LongreEt voilà la grande affaire : les mots, qui vivent et qui donnent la vie, qui ont leur « territoire de chasse ». Le festin proposé par Marius Daniel Popescu se termine, en guise de digestif, par une série de courts poèmes tels qu’il en a le secret, au centre desquels trône justement le mot « MOT », qui donne des rendez-vous à ses congénères. « Ensemble, ils forment de petits groupes », et notre auteur, narrateur et poète tout uniment, a le don de les aider dans leurs démarches – ce qui nous permet de lire des images belles et surprenantes, telle celle-ci, prise au hasard : « La dame âgée d’en face était une feuille morte encore attachée à la branche de son thé. ». La forêt, la vie… Vraiment, si comme il l’écrit dans l’un de ses poèmes, « le persil appelle au travail », la récolte est une réussite absolue.

    Jean-Pierre Longre

    Le persil journal, Marius Daniel Popescu, avenue de Floréal 16, 1008 Prilly, Suisse.

    Tél.  +41.21.626.18.79

    www.facebook.com/journallitterairelepersil

    E-mail : mdpecrivain@yahoo.fr

    Association des Amis du journal Le persil lepersil@hotmail.com

  • Quelques parutions récentes

    Roman, Essai, Revue, Roumanie, francophone, Mariana Gorczyca, Ina Delaunay, éditions Non Lieu,  Luminitza C. Tigirlas, Marina Tsvetaeva,  éditions de Corlevour, Benjamin Fondane, Société d’études Benjamin Fondane, Jean-Pierre LongreMariana Gorczyca, Cadence pour une marche érotique. Roman traduit du roumain par Ina Delaunay, éditions Non Lieu, 2019

    « En Roumanie, l'histoire d'un triangle amoureux entre une docteure, une professeure et un pianiste, tous épris de liberté durant les dernières années du régime de Ceausescu. »

    « Sur de grands mouvements musicaux se joue un roman de la séduction : séduction amoureuse, séduction artistique, séduction consumériste. Mais le séducteur n'est pas nécessairement une figure abjecte, il est ici l'élan vital. Le pianiste virtuose Tiberiu Vánky, et trois femmes de sa vie amoureuse, Renate, Ana et Margit, improvisent leurs expériences sexuelles dans une Transylvanie multiethnique et durant les dernières années grises du régime de Ceausescu. Ils s'abîmeront, se perdront et se retrouveront dans une marche effrénée pour accéder à une certaine forme de liberté. 1990 ouvre en Roumanie une perspective plus séduisante, un tempo plus joyeux, quand le peuple peut finalement respirer, rêver, passer les frontières... Les trois femmes évoluent alors dans une nouvelle harmonie : assumant une féminité plus complexe, elles se libéreront des mœurs anciennes, au contraire de Tiberiu Vánky qui restera fidèle à la fantaisie de ses aventures. Publié pour la première fois en 2010, considéré comme l'un des meilleurs romans roumains d'après la Révolution de 1989, ce livre a remporté trois prix nationaux importants. »

    www.editionsnonlieu.fr

     

     

    Roman, Essai, Revue, Roumanie, francophone, Mariana Gorczyca, Ina Delaunay, éditions Non Lieu,  Luminitza C. Tigirlas, Marina Tsvetaeva,  éditions de Corlevour, Benjamin Fondane, Société d’études Benjamin Fondane, Jean-Pierre LongreLuminitza C. Tigirlas, Fileuse de l'invisible — Marina Tsvetaeva,  éditions de Corlevour, coll. Essais, 2019

    « Inspiré par l’œuvre et la vie de la poétesse russe Marina Tsvetaeva, l’essai de Luminitza C. Tigirlas couronne ce qu’on peut appeler une Trilogie, initialement intitulée « Parfaire le sacré sans pardonner l’amour », texte un peu volumineux pour voir le jour dans un seul livre. Sa publication a été possible en trois volets qui interrogent le sacrifice de l’amour au nom de la création et dans le silence du sacré, commencée avec Rilke-Poème. Élancé dans l’asphère (L’Harmattan, 2017) et poursuivie dans l’ordre de leur publication par l’essai Avec Lucian Blaga, poète de l’autre mémoire, (éditions du Cygne, avril 2019). »

     « Le fil est une voix créatrice d’hérésies, elle monte au-dessus du métier de la fileuse de l’invisible — Marina Tsvetaeva (1892-1941). Sa nécessité rythmique d’être poète est celle de vivre, d’accomplir sa mission « d’oreille de la voix ». Se disant « murée vive », Marina exhorte le monde à la vérité de la perte et au franchissement poétique du Mur qui l’exile à l’intérieur d’elle-même. La poétesse s’appelle tour à tour Ariane, Maroussia, Tatiana, Sonetchka, Anna, Frère féminin, Rilke, Pasternak, Dieu-Diable, Noyé, Musique, Mère-Morte, Meurtrimère… Vide, Âme, Dieu… Poète de l’être à l’âme toute nue, Marina Tsvetaeva se fonde et se refonde dans une exposition poétiquement hérétique et, pourquoi pas, lyriquement croyante. Son exigence particulière pour le sacré fait ériger en vers « la vérité céleste contre la vérité terrestre ». Le vide, l’âme, le mystère et le sacrifice en tant qu’il est la « passion de la mort » nous interpellent au cœur des œuvres lues au cours de cet essai dans leur reflet de l’amour de l’amour en même temps que son refus. Passionnément, le désir d’amour de Marina est désir de mort. »

     

    TABLE

    Liminaire 9

    I Au métier du hors-âme 13

    II Brisures et éclatement d’un « Dieu-Diable » 43

    III Brûlure du Vide à vif du poème 59

    IV Saule-Sapho, frère féminin 95

    V Être unique et ne pas rencontrer l’Homme 123

    VI Au monde — du son irrecevable 149

    VII Où sont les mots à ne pas finir ? 167

     

    http://luminitzatigirlas.eklablog.com/fileuse-de-l-invisible-marina-tsvetaeva-a163982130

    https://editions-corlevour.com

     

     

    Roman, Essai, Revue, Roumanie, francophone, Mariana Gorczyca, Ina Delaunay, éditions Non Lieu,  Luminitza C. Tigirlas, Marina Tsvetaeva,  éditions de Corlevour, Benjamin Fondane, Société d’études Benjamin Fondane, Jean-Pierre LongreCahiers Benjamin Fondane n° 22. « Pourquoi l'art - Chimériques esthétiques ». Société d’études Benjamin Fondane, 2019

     

    Sommaire du numéro



    Éditorial
    - Éditorial 


    • Chimériques esthétiques 
    - Critique et esthétique : de Gourmont à Fondane, Agnès Lhermitte
    - Fondane, Gourmont et Le Mercure de France, Vincent Gogibu
    - Réflexions liminaires sur le Faux Traité d’esthétique de 1925, Serge Nicolas 

    • Poésie et philosophie 
    - Présence de Chestov et de Nietzsche dans Ulysse, Alice Gonzi
    - Fondane théâtralement opposé à Valéry 

    • Cinéma et théâtre 
    - Correspondante inédite avec Jean Paulhan, Benjamin Fondane
    Rapt : un défi cinématographique, Carmen Oszi
    - Lucas Gridoux acteur de théâtre et de cinéma, Eric de Lussy 

    • Peinture 
    - En compagnie de Benjamin Fondane, Marina Levikoff
    - Fondane et Chagall, Saralev Hollander 

    • L’écrivain et le social 
    - Démocratie et art (inédit), Benjamin Fondane, traduit par Aurélien Demars
    - Devant l’Histoire, Evelyne Namenwirth
    - L’écrivain et son temps, Monique Jutrin
    - À propos d’une citation de Victor Hugo, Monique Jutrin
    - Les années 33-37 pour Benjamin Fondane, Margaret Teboul
    - À propos des hussards sabre au clair, Margaret Teboul 

    • Notes 
    - Fragment d’une lettre à Ion Călugăru, B. Fundoianu, traduit du roumain par Carmen Oszi
    - Dialogues au bord du gouffre, Gisèle Vanhese
    - Paysages, compte rendu, J-P Longre 

    • Informations 
    - Informations 

    • Bibliographie sélective 
    - Bibliographie sélective 

    • Collaborateurs

    www.benjaminfondane.com

  • Tribulations d’Est en Ouest

    Roman, Histoire, Roumanie, francophone, Michel Ionascu, L’Harmattan, Jean-Pierre LongreMichel Ionascu, Turbulences Balkaniques, L’Harmattan, collection « Lettres Balkaniques », 2018

    Petre Banea, inspecteur des crédits à la succursale de la Banque de Roumanie à Sibiu, et qui a toutes les apparences du « fonctionnaire au-dessus de tout soupçon », se trouve mêlé à un détournement d’avion lors d’un déplacement à Bucarest, détournement au cours duquel un policier est tué. Les passagers se retrouvant à Belgrade, Petre Banea, contre toute attente, demande l’asile politique. Nous sommes fin 1949, période où le communisme soviétique règne sur la Roumanie, tandis que la Yougoslavie titiste cherche son autonomie. Petre, on l’apprendra, rêve de joindre l’Ouest, si possible la France, pour y « trouver la liberté ». Ce faisant, il laisse au pays sa mère, avec laquelle il vivait à Sibiu, et son frère Spiridon, lieutenant dans l’armée, dont le tempérament et les options politiques sont radicalement différents de ceux de son frère.

    Débutant en pleine action, le « roman » (dont on se doute bien qu’il repose sur des faits réels) construit peu à peu le destin de Petre, tout en revenant périodiquement sur celui de Spiridon, qui va subir une déchéance progressive jusqu’à sa disparition. Découpé en de nombreuses séquences, à la manière d’un film (on sait que l’auteur, Michel Ionascu, est cinéaste), le récit se porte d’un lieu à un autre, reconstituant pour le lecteur le puzzle des tribulations de Petre et de la vie politique et sociale de l’époque, tout en élargissant le point de vue. C’est ainsi que l’on se déplace entre Sibiu, Piteşti, Bucarest, Belgrade, Brăila, Trieste, jusqu’à la France et Paris, le but ultime – cela de 1949 à1989, voire mars 2016 (date de la mort de Petre/Pierre Banea), et même février 2018, pour un épilogue mi inquiétant mi plaisant vécu par Daniel, son fils. 

    Le destin de Petre n’est pas dépendant de ses seules décisions. Le régime yougoslave, s’il est différent de la dictature roumaine, n’est pas pour autant synonyme de liberté, et il faudra beaucoup de patience, de ruse, de détermination et de courage au protagoniste pour rejoindre l’Europe occidentale et devenir Pierre Banea. Du côté roumain, les enquêtes, espionnages, dénonciations, perquisitions chez sa mère, luttes intestines au sein même des services politiques et policiers, les rivalités au sein de la Securitate – tout est détaillé d’une manière parfaitement documentée. Avec pour conséquence le poids des relations internationales : « Il était conscient qu’il dépendait de stratégies politiques qui le dépassaient largement et qui rendaient incertaine la résolution de sa situation personnelle. La presse locale ne manquait jamais une occasion de se faire l’écho du conflit politique qui opposait Staline et Tito et qui, par ricochet, empoisonnait les relations bilatérales entre les communistes roumains et yougoslaves. Les deux frères ennemis, deux pays voisins, s’affrontaient violemment au sein du Kominform, le Bureau d’Information des Partis Communistes et Ouvriers. ».

    Les occasions ne manquent pas à l’auteur, outre les questions individuelles, d’aborder les questions historiques, notamment sur le passé de la Roumanie (le fascisme et l’antisémitisme, la guerre, l’accession des communistes au pouvoir…) ainsi que sur des événements plus récents (la chute de Ceauşescu et la « révolution » roumaine), y compris en France (mai 68, les querelles politiques…). Et comme il est question de Brăila, Panaït Istrati est présent, nommément ou par allusion, au détour de plusieurs épisodes. Quoi qu’il en soit, même installé en France, Pierre n’oubliera jamais d’où il vient : « Petre était profondément roumain, très attaché à son pays, un pays dont il n’oublierait jamais la culture, les racines, l’histoire. Même réfugié en Occident, il continuerait la lutte pour l’honneur de cette nation des Carpates qui avait su donner au monde des artistes et des intellectuels tels que Eugen Ionesco, Emil Cioran, Virgil Gheorghiu, Mircea Eliade, Mihai Eminescu, Georges Enescu, Victor Brauner, Sergiu Celibidache, Panaït Istrati, Constantin Brâncusi, Tristan Tzara, Benjamin Fondane, Anna de Noailles, Mihail Sebastian, Elvire Popesco et tant d’autres créateurs moins connus, sans oublier… Béla Bartók que Petre n’hésitait pas à présenter comme Roumain ou Hongrois de Roumanie… ». Cet attachement à une culture particulièrement riche n’est-il pas celui des nombreux Roumains installés à l’étranger ? Turbulences Balkaniques se présente comme une fiction qui, tout en préservant l’intérêt narratif, aborde de nombreux sujets liés à une histoire réelle, à la fois collective et personnelle ; pour tout dire, un beau récit documentaire, biographique et romanesque, dans lequel on sent l’auteur intimement impliqué.

    Jean-Pierre Longre

     

    www.michelionascu.com

    www.editions-harmattan.fr 

  • Appel à candidatures pour la reprise de la librairie Kyralina (Bucarest)

    EspaceLitterature01.jpgCher.e.s ami.e.s de Kyralina,

    La librairie est aujourd’hui à la croisée des chemins et a besoin de votre aide. 

    Plusieurs départs au sein de l’équipe auront lieu à l’été et nous sommes dans l'incertitude quant à nos capacités à maintenir ouverte la librairie en étant en sous-effectif. 

    Cette situation peut être l’opportunité de se réinventer une fois de plus, comme la librairie l’a déjà fait plusieurs fois avec succès. Du moins c'est notre souhait le plus cher car, si jusqu'à présent nous avons réussi à rebondir et trouvé des personnes compétentes et de confiance pour gérer la librairie en notre absence, nous sommes aujourd'hui à court de solutions pour remédier à cette situation qui rend de fait l'avenir de Kyralina incertain.

    La situation financière de la librairie reste saine : pas de dettes ni d’emprunts bancaires, une croissance modeste mais constante du chiffre d’affaires (220 K€ en 2018), des relations de confiance avec ses partenaires commerciaux et institutionnels.

    EspaceLitterature04.jpgParce que nous sommes convaincus que la librairie a toute sa place à Bucarest et doit continuer à exister, nous nous mobilisons en relançant une dernière fois notre recherche d’un.e repreneur.euse (de la moitié des parts au moins), qui idéalement serait également le nouveau directeur ou la nouvelle directrice de la librairie. C’est le sens de ce message que nous vous adressons, parce que vous connaissez Kyralina, de près ou de loin, de longue date ou d’une amitié plus récente. 

    Aujourd'hui nous lançons un appel à candidatures pour la reprise de la librairie

    Tous les schémas sont envisageables. Notre espoir est de trouver une personne ou un groupe de personnes qui aura envie de poursuivre cette aventure et de porter le projet avec enthousiasme et créativité, comme l'ont fait toutes les personnes qui y ont travaillé depuis 6 ans. C'est ici pour nous l'occasion de saluer le travail remarquable de Valentine Gigaudaut et de Virgile Prod'homme qui ont porté à tour de rôle le projet, avec une grande générosité et un enthousiasme indéfectible. Nous ne les remercierons jamais assez. 

    Nous sommes certains que la librairie peut trouver un second souffle. Pour cela il faut informer le plus grand nombre de cet appel à la reprise. C'est sur ce point que votre aide et votre collaboration nous seront précieuses car nous sommes pressés par le temps. 

    Comment pouvez-vous nous aider ?


    L’idée est de diffuser cet appel le plus largement possible. Parlez-en autour de vous, transmettez ce message, faites-nous part de vos idées et suggestions. Vous connaissez sans doute des gens qui s'intéressent à la Roumanie, au livre, à la culture française, aux échanges culturels, voire tout ça à la fois. Parmi eux, certains ont peut-être envie de se lancer dans cette aventure entrepreneuriale et culturelle. Nous sommes à leur écoute pour réfléchir ensemble aux contours du projet et aux conditions de la reprise. Nous tenons à la disposition des personnes intéressées toutes les données comptables pertinentes, y compris l’expertise financière réalisée par des professionnels du secteur. 

    Notre objectif est de trouver une solution d’ici début juillet afin de gérer la transmission dans les meilleures conditions.

    Par avance, nous vous remercions pour votre soutien et restons à votre disposition pour tout complément d'information. 

    Amicalement, Sidonie et Bruno

    Propriétaires de Kyralina

    http://www.kyralina.ro/

    sidonie.mezaize@gmail.com

  • « Dans le silence du sacré », « ça crée »

    Essai, poésie, théâtre, francophone, Roumanie, Moldavie, Lucian Blaga, Luminitza C. Tigirlas, éditions du Cygne, Jean-Pierre LongreLuminitza C. Tigirlas, Avec Lucian Blaga. Poète de l’autre mémoire, éditions du Cygne, 2019

    Le livre commence avec la Ballade de Maître Manole que la bunica (la grand-mère) de l’auteure lui racontait dans son enfance ; il continue avec Lucian Blaga, dont on connaît bien la poésie, moins bien la philosophie ou le poème dramatique Manole, Maître bâtisseur. Ainsi le titre se justifie-t-il par une sorte d’intimité entre l’écrivain roumain et Luminitza C. Tigirlas. Son propos est de « questionner l’énigme » de ce Maître Manole qui enferma son épouse dans la muraille du monastère dont il avait dirigé la construction, questionnement qui prend « la liberté de certains détours par la position subjective d’analysante » (ce qui permet d’explorer « l’autre mémoire » suggérée par le sous-titre).

    N'entrons pas ici dans le détail de l’analyse. Disons simplement que celle-ci est fouillée, semée de références à Freud et à Lacan, mais aussi à beaucoup d’autres penseurs, philosophes et écrivains (Sophocle, Platon, Ovide, Apulée, Kierkegaard, Goethe, Nietzsche, Dostoïevski, Rilke, Heidegger, Marguerite Yourcenar, Paul Celan, on en passe…). Mais l’érudition n’est pas sèche. La poésie des paysages, de la langue maternelle, des souvenirs personnels, celle du silence et de la parole, cette poésie court en filigrane dans la trame des pages.

    Et sans qu’il y ait conflit avec ce qui précède, le psychanalyse nourrit ici l’étude thématique issue d’une lecture personnelle. Les thèmes de l’amour et de la mort, des mythes fondateurs, du sacrifice, de l’eau (« inséparable de l’humus natal »), du sacré (« ça crée ? ») – tout cela se combine dans une exploration approfondie de l’œuvre de Lucian Blaga et, d’une manière plus large, de l’écriture fondée sur la mémoire. Luminitza C. Tigirlas décompose parfaitement le cheminement de la création et de ses « avancées fécondes » : « La mise en scène d’un personnage tel le maître d’œuvre Manole avec la désignation de son acte par un édifice réel, le Monastère d’Argeş, est présentée comme un miracle. De là ont pris vie différents genres populaires – légende, mythe, ballade – pour nourrir ensuite des exégèses ou inspirer des compositeurs ou écrivains modernes, comme le fit Lucian Blaga. ». Voilà qui incite à la lecture.

    Jean-Pierre Longre

    http://luminitzatigirlas.eklablog.com

    https://www.editionsducygne.com/editions-du-cygne-avec-lucian-blaga.html

    https://www.editionsducygne.com

  • Récolte de printemps

    Le Persil, numéro triple 162-163-164, mars 2019revue, Le Persil, francophone, suisse, roumanie, marius daniel popescu, jean-pierre longre

    Dans le premier texte, « Lire, demain ? » Marc Atallah est chargé de nous parler de la « littérature du futur ». Ce faisant, c’est la littérature de toujours qui devient l’objet de son propos, et c’est tant mieux. Le meilleur remède à la « consommation outrancière profondément individualiste », à la « communication cacophonique », au « libéralisme carnassier » et à la solitude qui en découle ? Les livres !

    Les 48 pages grand format de cette nouvelle livraison du fidèle Persil de Marius Daniel Popescu en sont un roboratif témoignage. Extraits, poèmes, nouvelles de Marc Agron, Antonio Albanese, Léa Farine, Thierry Luterbacher, Béatrice Monnard, Julien Mages, Maurice Meillard, Christine Rossier, Gilles de Montmollin témoignent de la vigueur et de l’épanouissement de la littérature de Suisse romande. Et les deux nouvelles de « l’invité » qui closent l’ensemble prouvent que, dans le domaine littéraire au moins, la Suisse, la Roumanie et la France font un excellent ménage à trois.

    Jean-Pierre Longre

     

    "Journal inédit, le persil est à la fois parole et silence ; ce numéro triple contient des textes inédits d’auteurs de Suisse romande et deux nouvelles de notre invité, Jean-Pierre Longre"

    Le persil journal, Marius Daniel Popescu, avenue de Floréal 16, 1008 Prilly, Suisse.

    Tél.  +41.21.626.18.79

    www.facebook.com/journallitterairelepersil

    E-mail : mdpecrivain@yahoo.fr

    Association des Amis du journal Le persil lepersil@hotmail.com

  • Cioran et la solitude

    Essai, francophone, Roumanie, Cioran, Aurélien Demars, Mihaela-Genţiana Stănişor, Classiques GarnierCioran, archives paradoxales. Nouvelles approches critiques, Tome IV. Sous la direction d’Aurélien Demars et Mihaela-Genţiana Stănişor, Classiques Garnier, 2019

    Présentation :

    « Épreuve ou aubaine du destin, la solitude tourmente sans cesses Cioran. Solitude de soi, d’autrui, de Dieu ou des choses, elle frappe aveuglément tout et tous. Symptôme, détresse ou, au contraire, force, puissance d’autonomie, remède aux tribulations du monde, la solitude enserre Cioran dans l’insoluble mais l’ouvre aussi à l’acmé d’une intériorité tragique aux dimensions cosmiques. Que signifie la solitude cioranienne ? Est-elle éloignement du monde ou rapprochement de soi ? Écrire, donc communiquer, n’est-ce pas contraire à la solitude ? Ne condamne-t-elle pas au silence ? Autant de questions qu’examinent les études réunies ici. »

     

    SOMMAIRE

     

    Pages 7 à 11

    Introduction : « Solitude du destructeur », Demars (Aurélien)

    PREMIÈRE PARTIE, DOSSIER THÉMATIQUE : LA SOLITUDE

    Pages 15 à 34

    « Les solitaires d’E. M. Cioran : aphorismes et fragments. Cioran, maître de la forme courte, et la tradition européenne de l’aphorisme, de la maxime et du fragment », Le Rider (Jacques)

     

    Pages 35 à 57

    « La solitude ou le mal d’être chez Cioran », Stănişor (Mihaela-Genţiana)

     

    Pages 59 à 72

    « Le solitaire : un déserteur sans désert », Garrigues (Pierre)

     

    Pages 73 à 83

    « Solitude et lumière. Ténèbres du troglodyte et éblouissement du désert chez Cioran », Chatelet (Lauralie)

     

    Pages 85 à 105

    « Solitude et silence selon Cioran. Le blasé de la ville et du désert », Demars (Aurélien)

     

    Pages 107 à 113

    « Du vain espoir d’être seul », Zaharia (Constantin)

     

    Pages 115 à 121

    « Sur la solitude de Cioran », Santacroce (Christian)

     

    Pages 123 à 134

    « La solitude cosmique de Cioran », Lăzărescu (Mircea)

     

    Pages 135 à 142

    « La solitude comme lieu de rencontre avec Dieu », Chelariu (Ionuţ Marius)

     

    Pages 143 à 156

    « Cioran et l’entretien avec soi dans la solitude »

    Baron (Dumitra)

     

    Pages 157 à 179

    « Styles de solitude à l’époque de la barbarie », Enache (Răzvan)

     

    Pages 181 à 186

    « Cioran ou la solitude d’un ami », Vanini (Paolo)

     

    Pages 187 à 204

    « Cioran, l’être « impensablement seul », et « la solitude absolue » de Ţuţea. Une correspondance étonnante », Brad (Rodica)

     

    Pages 205 à 214

    « Cioran et Blanchot. Les « hérétiques de l’existence », les hérétiques de la solitude », Popescu (Gabriel)

     

    Pages 215 à 225

    « Penser contre soi, écrire malgré soi. Cioran et Kafka », Garcia-Guillem (Sergio)

     

    Pages 227 à 235

    « Mélancolie, nostalgie et solitude chez Emil Cioran. Les harmonies ibériques », Pérez López (Pablo Javier)

    DEUXIÈME PARTIE : POINTS DE FUITE

    Pages 239 à 245

    « « Dans la tourmente d’un mystique. Une lecture de Cioran », Lesimple (Alain)

     

    Pages 247 à 250

    « Cioran à l’encontre de Valéry », Demars (Aurélien)

     

    Pages 251 à 253

    « Synopsis des principaux colloques internationaux consacrés à Cioran », Demars (Aurélien)

  • L'engagement de l’écrivain face à la complexité de l’histoire

    Autobiographie, Histoire, Roumanie, Gabriela Adameşteanu, Nicolas Cavaillès, Jean-Yves Potel, éditions Non Lieu, Jean-Pierre LongreGabriela Adameşteanu, Les Années romantiques, traduit du roumain par Nicolas Cavaillès, préface de Jean-Yves Potel, éditions Non Lieu, 2019

    « Ce livre parle de moi, mais en l’écrivant j’espère bien que d’autres se reconnaîtront dans mes expériences, dans ce qu’il m’a été donné de vivre. ». La lecture de l’ouvrage nous montre, en effet, comment une écriture particulière peut largement transcender l’autobiographie, le récit personnel, pour offrir une vision à la fois générale et précise, une véritable somme historique, politique, sociologique, tout en ménageant l’intérêt narratif. Car le récit de ces « années romantiques » (expression à prendre sans doute avec un sourire de lucidité), de ces années qui ont accompagné et suivi ce que d’aucuns appellent « révolution », que Gabriela Adameşteanu, avec beaucoup d’autres, qualifie de « coup d’État », ce récit, donc, tient aussi bien de la littérature que de l’essai.

    De nombreux fils tissent le texte, certains plus serrés que les autres. Cela commence par l’invitation faite à l’auteure par l’« International Writing Program » pour une résidence à Iowa City, quelques semaines au cours desquelles s’ouvre à elle cette Amérique dont elle ne rêvait pas vraiment (la France l’attirait plus), mais des semaines qui lui permettront, en particulier, d’interviewer à Chicago le dissident et disciple de Mircea Eliade Ioan Petru Culianu, réfugié aux USA après maintes tribulations, esprit particulièrement vif et réfléchi, homme d’une grande culture, qui mourra étrangement assassiné quelques semaines après cet entretien, non sans avoir fait découvrir à l’auteure et aux personnes qui le liront dans le journal d’opposition 22 le rôle meurtrier des manipulations du KGB, de la Securitate et des dirigeants communistes roumains dans un « scénario » destiné à chasser Ceauşescu, fin 1989, en faisant croire à une révolution populaire.

    Autres fils conducteurs : l’accident survenu en février 1991 dans le Maramureş, en compagnie d’Emil Constantinescu (futur président d’« alternance » en 1996), accident qui vaudra à l’auteure de rester alitée plusieurs mois et de laisser libre cours à ses réflexions et à ses doutes ; le travail acharné pour l’organe du G.D.S. (« Groupe pour le dialogue social »), le journal 22, qu’elle a dirigé de 1991 à 2005 ; et, liée à cela, la contestation de la prise du pouvoir par Ion Iliescu, Petre Roman et quelques autres anciens dirigeants du parti communiste roumain – ce qui l’a conduite, comme la plupart des écrivains de l’époque, à laisser de côté la création : « Jusqu’en l’an 2000, environ, je n’ai plus écrit ni lu de prose : seulement la presse, roumaine ou étrangère, et des livres se rapportant de près ou de loin au journalisme. Quand j’échappais à l’obsession du journal, d’ordinaire pendant de courts voyages qui me conduisaient à des séminaires de presse, je prenais, sans projet précis, des notes, dans divers cahiers. ».

    D’ailleurs, si plusieurs questions parcourent le livre (le rôle des politiciens dans la conduite des affaires et le destin du pays, le passé de la Roumanie avec ses compromissions, avec l’antisémitisme dont fut accusé, par exemple, Mircea Eliade, avec l’accession en force des communistes au pouvoir, avec les méfaits de la dictature sur les consciences et les relations humaines etc.), celle de l’engagement, de l’activité ou de la passivité des écrivains est récurrente. « Jusqu’où un écrivain peut-il aller dans les compromis, dans la vie, en littérature, dans le journalisme, et à partir de quel moment ces compromis affectent-ils la qualité de son écriture ? Si c’est bien le cas ? Sur ces questions, les verdicts sont plus nombreux que les débats. Les jeunes générations n’ont pas les moyens de comprendre la vie sous un régime totalitaire mieux que les citoyens des pays occidentaux qui n’ont pas fait cette expérience. À moi aussi il est arrivé d’émettre des jugements tranchés, sans nuances, avec cette condescendance, pour ne pas dire ce mépris, biologique, des jeunes envers la génération antérieure. J’ai longtemps repoussé in corpore les écrivains du réalisme socialiste, eux et toutes leurs œuvres. ». Un livre ponctué d’interrogations, donc, et qui décrit avec acuité, sans occulter ni les options ni les doutes personnels, la vie politique, intellectuelle, culturelle, littéraire d’une période tourmentée. Un livre où l’on croise beaucoup de personnalités marquantes ; pour n’en citer que quelques-unes : Paul Goma, exilé à Paris, la poétesse Ana Blandiana, figure, avec son mari Romulus Rusan, de l’Alliance Civique, I.P.Culianu déjà cité, Dumitru Ţepeneag, lui aussi exilé à Paris après avoir créé à Bucarest le groupe oniriste, Emil Constantinescu, Mircea Căratărescu, l’un des grands représentants avec Gabriela Adameşteanu de la littérature roumaine contemporaine, et qui séjourna en même temps qu’elle à Iowa City… Les noms foisonnent, les personnages abondent. Mais Les Années romantiques n’est pas une galerie de portraits, ni, seulement, une autobiographie ou un essai historico-politique. C’est vraiment une œuvre d’écrivain, dont la construction suit les méandres de la mémoire et de la vie personnelle et collective, rendant ainsi compte d’une période difficile.

    Ajoutons que, à l’appui de cette construction mémorielle, le livre est un véritable traité d’anti-manichéisme : « La vie et la littérature ont contredit mon manichéisme. Mais il a résisté aux années romantiques. Dès mon enfance, j’ai senti qu’il était très mal d’“écrire pour le Parti”. J’ai atteint la liberté sans avoir “péché” par la moindre ligne de compromission, mais en portant toujours en moi, inversé, le manichéisme de mon éducation communiste. Il m’a fallu bien des années pour en sortir – si j’en suis vraiment sortie. […] Dans ce communisme qui a englouti les vies de nos parents et qui semblait prêt à durer plus longtemps que nos propres vies, une autre catégorie de gens a existé, beaucoup plus large : ceux qui s’efforçaient de mener une vie normale, en ne faisant que les compromis inévitables. Cette appréhension d’un monde disparu est plus complexe et moins intéressante pour ceux qui ne l’ont pas vécu – les Occidentaux et la majorité des jeunes d’aujourd’hui. ». C’est à cette « appréhension » « moins intéressante » que nous devons nous intéresser, et que doit nous intéresser la littérature, en nous mettant au cœur de la « complexité » de la vie.

    Jean-Pierre Longre

    www.editionsnonlieu.fr

  • Un lyrisme de rupture

    Poésie, Roumanie, Benjamin Fondane, Odile Serre, Mircea Martin, Monique Jutrin, Le temps qu’il fait, Jean-Pierre LongreBenjamin Fondane, Paysages, poèmes 1917-1923 traduits du roumain par Odile Serre. Préface de Mircea Martin, avant-propos de Monique Jutrin. Le temps qu’il fait, 2019.

    Entre 1917 et 1923, c’est-à-dire avant son installation à Paris, Benjamin Fondane écrivit un certain nombre de poèmes dans sa langue maternelle, regroupés en 1930 sous le titre de Privileşti, terme complexe (comme le fait remarquer Monique Jutrin : « regard, vue, champ de vision ») traduit par Paysages. Ce titre et la thématique de beaucoup de poèmes pourraient faire croire à des évocations de la campagne roumaine, à un lyrisme bucolique dans la tradition du post-romantisme ou du symbolisme. Mais comme le font remarquer à juste titre Mircea Martin et Monique Jutrin, ce recueil est en « rupture » par rapport à ceux dont il semble se faire l’écho (Alecsandri, Eminescu, Blaga…) ; et si l’on y rencontre beaucoup de bovidés rappelant ceux du peintre Grigorescu, ils sont souvent liés à la morbidité de la nature.

    Dans ses « Mots sauvages » (titre de sa préface, on ne peut plus significatif), Fondane lui-même écrit : « Poésie ! Combien d’espoirs j’ai mis en toi ! Quelle certitude, quel messianisme ! J’ai cru en effet que tu pouvais apporter une réponse là où la métaphysique et la morale avaient depuis longtemps tiré les volets. […] J’ai brusquement compris que mon paradis terrestre avec bœufs, abondance, bouse, était mensonge, et mensonge le poème où il se trouvait. Mensonge, Hugo, Goethe ! Mensonge séraphique Eminescu ! Avec Baudelaire et Rimbaud seuls pointait une lueur de vérité. ». C’est un fait : ses poèmes se situent du côté de la « force obscure ». Si les champs, les animaux, la vigne, l’automne, l’amour y sont des leitmotive, ils se présentent sur le mode de l’insolite, de l’expressionnisme, de la séparation, voire du désespoir. Les accents baudelairiens, rimbaldiens, apollinariens résonnent comme « le spleen » (titre de l’un des textes). Les nuages planent « au-dessus du fumier », le taureau et la vache « lancent à la lune des mugissements lents et stupides »… Si lyrisme il y a, il se heurte de plein fouet à la dérision.

    Et si l’amour est invoqué, il se heurte à la mort :

                       « – Aimes-tu, mon amour, les paysans aux semailles

                       et les chevaux morts, morts en ce jour d’été ? »

    Vrai poète, Benjamin Fondane l’est à coup sûr, dès le début. Vrai poète, parce qu’il rompt avec la tradition sans la renier complètement, parce qu’aussi il prévoit, il annonce la mise en route d’une œuvre d’avant-garde nécessitant cette rupture, et prédit en quelque sorte la suite :

                       « Mais un soir viendra où je partirai d’ici,

                       sans savoir très bien où je vais ni même

                       si m’attend la mort putride ou la semence d’une autre vie.

                       Le silence comme un tertre m’ensevelira. »

    Jean-Pierre Longre

    www.letempsquilfait.com

    www.benjaminfondane.com

  • En langue roumaine

    Quelques parutions récentes chez les éditeurs roumains

    Des essais, des documents, des œuvres de fiction… Les auteurs et les éditeurs roumains proposent toujours de nombreux livres, dont beaucoup méritent une attention internationale. En voici quelques exemples. Merci à Mircea Anghelescu, professeur émérite à l’Université de Bucarest, de nous avoir fait parvenir ces ouvrages.

    Littérature, essais histoire, Roumanie, Mircea Anghelescu, Lucian Boia, Radu Paraschivescu, Gabriela Adameşteanu, Lucian Dragoş Bogdan, Polirom, Humanitas, Tritonic

    Călători români şi călătoriile lor în secolui al XIX-lea (Voyageurs roumains et leurs voyages au XIXème siècle). Antologie, prefaţă şi note de Mircea Anghelescu, Polirom, Biblioteca Memoria, 2018. Textes sur différents pays (dont la Roumanie) vus par de nombreux écrivains, parmi lesquels V. Alecsandri, Al. Macedonski…

    Littérature, essais histoire, Roumanie, Mircea Anghelescu, Lucian Boia, Radu Paraschivescu, Gabriela Adameşteanu, Lucian Dragoş Bogdan, Polirom, Humanitas, Tritonic

    Lucian Boia, Cum mam trecut prin communism, Primul sfert de veac (Comment j’ai vécu le communisme), Humanitas, 2018. Autobiographie de l’un des grands historiens contemporains, assortie de documents photographiques.

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    Radu Paraschivescu, Orice om îi este teamă. Un partid, doi ani şi trei premieri (Tout le monde a peur. Un parti, deux ans, trois premiers ministres), Humanitas, 2018. Sur la situation politique actuelle.

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    Gabriela Adameşteanu, Fontana di Trevi, Polirom, 2018. Par la grande romancière contemporaine (voir ICI).

    parfumul-cracoviei-lucian-dragos-bogdan.jpg

    Lucian Dragoş Bogdan, Parfumul Cracoviei, Tritonic, 2017. « Deux couples. Quatre destins. Et une lutte désespérée entre le cœur et la raison ».

     

    www.polirom.ro

    www.humanitas.ro

    www.tritonic.ro

  • Silence et création

    Poésie, Roumanie, Lucian Blaga, Jean Poncet, Horia Bădescu, Jacques André éditeur, Editura Şcoala Ardeleană, Jean-Pierre LongreLucian Blaga, În marea trecere / Dans le grand passage, édition bilingue. Traduction du roumain et avant-propos par Jean Poncet, postface par Horia Bădescu. Jacques André éditeur / Editura Şcoala Ardeleană, 2018

    L’éditeur lyonnais Jacques André tient ses promesses : le troisième recueil de Lucian Blaga, În marea trecere / Dans le grand passage, traduit comme les précédents par Jean Poncet, vient de paraître. Et voilà le chroniqueur comblé, parce qu’il s’aperçoit qu’il a maintenant sur les rayons de sa bibliothèque trois versions bilingues de ce recueil, initialement paru en 1924 : la première, comprise dans un vaste volume intitulé Poemele luminii /Les poèmes de la lumière et traduit par Paul Miclău pour les éditions Minerva (Bucarest), date de 1978 ; la seconde, intitulée În marea trecere / Au fil du grand parcours, est parue en 2003 aux éditions Paralela 45 (Piteşti) dans une traduction de Philippe Loubière ; et la troisième est celle dont il est ici question. Tout cela pour mettre l’accent sur le succès de Lucian Blaga auprès des traducteurs, des éditeurs et des lecteurs, qui peuvent ainsi disposer de trois traductions du recueil. Chaque traduction de valeur (ce qui est le cas) non seulement contribue à mieux faire connaître l’œuvre, mais l’enrichit de résonances nouvelles.

    Mon intention n’est pas de les comparer, ces traductions (ni évidemment de les hiérarchiser). On aura vu les variations du titre (Philippe Loubière). Un simple aperçu des trois premiers vers du premier poème (« Către cititori », « Aux lecteurs ») suffira à mesurer combien la traduction de la poésie, d’une manière générale, est affaire non seulement de compétence linguistique, mais aussi de sensibilité personnelle.

    Paul Miclău : C’est ici ma maison. Là le soleil, le jardin et ses ruches.

                       Vous passez sur la route, regardez par la grille de la porte

                       et attendez que je parle. – Mais par où commencer ?

    Philippe Loubière :  Ma maison est ici. Derrière

                                          Est le soleil et le jardin avec ses ruches.

                                Vous qui passez sur le chemin,

                                          Vous voyez à travers les barreaux du portail

                                Et guettez mes propos. Par où commencerais-je ?

    Jean Poncet : Ici est ma maison. Là le soleil et le jardin avec ses ruches.

                       Vous qui passez sur la route, vous regardez par la grille du portail,

                       Attendant que je parle. – Par où commencer ?

    À chacun de se faire son idée.

    Par où poursuivre ? Par le volume qui nous occupe principalement dans cette chronique. Dans son avant-propos, Jean Poncet insiste sur le sens du titre et sur la substance du recueil, que ce titre synthétise : le « grand passage » est celui qui mène vers la mort, et dans sa postface, Horia Bădescu évoque ce qui est pour lui le thème central : « la tentation du silence et la sémantique de l’absence ». Face au monde, se taire et disparaître. Poncet et Bădescu, tous deux poètes, perçoivent profondément ce qui est au cœur des vers de Blaga : le pessimisme, qui transforme les prières en mots « amers », l’espérance en aspiration vers le vide. Mais ce pessimisme n’est pas absolu. Si les textes sacrés sont revisités, c’est au profit d’images nouvelles, d’une osmose entre le « je » et la nature :

                                Seul mon sang brame dans les bois

                                à son enfance lointaine

                                tel un cerf fatigué

                                à sa biche perdue dans la mort.

    Et « le mot se fait acte », chantant et bâtissant toujours le village cher au poète (« En vérité l’éternité est née dans le village ») et redisant le goût de la vie simple, dans une présence au monde qui met la contemplation et l’art au-dessus de l’action (« Je danse au-dessus de l’action »).

    Les recueils de Lucian Blaga se suivent sans se ressembler, dans une évolution qui frise la contradiction. Mais une contradiction qui se résout dans une perspective constructive : le cheminement vers la mort, le désir de silence et d’invisibilité ne peuvent passer que par un « être au monde » lyrique et créateur.

    Jean-Pierre Longre

    www.jacques-andre-editeur.eu

    http://scoalaardeleanacluj.ro/wp

    L. Blaga, Au fil du grand parcours.pdf

  • Mémoire et « moments forts »

    Récits, francophone, Roumanie, Cornelia Petrescu, Edilivre, Jean-Pierre LongreCornelia Petrescu, L’Écho de la lumière, Edilivre, 2018

    Les six textes en prose de ce nouveau livre de Cornelia Petrescu (qui a publié plusieurs ouvrages en roumain et en français) révèlent des souvenirs personnels ou collectifs filtrés et poétisés par la mémoire. Si le premier, qui donne son titre au recueil, est un « texte imaginaire » symbolisant la remontée à la source et composé de visions oniriques et fantastiques, les suivants sont fondés sur des « faits réels » entrant dans l’histoire individuelle, de soi ou des autres.

    Les récits sont liés au passé récent de la Roumanie, alors que le pays et ses habitants tentaient de vivre sous le joug de la dictature. On suit les malheurs de cette vieille dame dont la chèvre a commis un sacrilège politique, ce qui a valu à sa propriétaire 18 ans de prison pour « profanation de la direction du Parti »… Le grotesque et le dramatique se confondent… Il y a aussi le sort tragique de ces étudiants de Timişoara « qui ont défilé pour apporter leur soutien à la Perestroïka de Gorbatchev [et qui] ont été exécutés en prison. ». Ou encore les retombées de la catastrophe de Tchernobyl que les lois de la « Securitate » n’ont rien fait pour arranger.

    À côté de cela, de fraîches questions enfantines (par exemple sur les secrets que renferme le cocon du ver à soie) et les belles descriptions de paysages, comme ceux de la Dobrogea en fleurs. Et si l’on sent bien que la langue utilisée par l’auteure n’est pas sa langue maternelle, la « roumanité » de son propos, dans la forme et dans le fond, n’est pas étrangère à la poésie de ces récits tragiques.

    Jean-Pierre Longre

    www.edilivre.com

    www.cornelia-petrescu.info