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  • Silence et création

    Poésie, Roumanie, Lucian Blaga, Jean Poncet, Horia Bădescu, Jacques André éditeur, Editura Şcoala Ardeleană, Jean-Pierre LongreLucian Blaga, În marea trecere / Dans le grand passage, édition bilingue. Traduction du roumain et avant-propos par Jean Poncet, postface par Horia Bădescu. Jacques André éditeur / Editura Şcoala Ardeleană, 2018

    L’éditeur lyonnais Jacques André tient ses promesses : le troisième recueil de Lucian Blaga, În marea trecere / Dans le grand passage, traduit comme les précédents par Jean Poncet, vient de paraître. Et voilà le chroniqueur comblé, parce qu’il s’aperçoit qu’il a maintenant sur les rayons de sa bibliothèque trois versions bilingues de ce recueil, initialement paru en 1924 : la première, comprise dans un vaste volume intitulé Poemele luminii /Les poèmes de la lumière et traduit par Paul Miclău pour les éditions Minerva (Bucarest), date de 1978 ; la seconde, intitulée În marea trecere / Au fil du grand parcours, est parue en 2003 aux éditions Paralela 45 (Piteşti) dans une traduction de Philippe Loubière ; et la troisième est celle dont il est ici question. Tout cela pour mettre l’accent sur le succès de Lucian Blaga auprès des traducteurs, des éditeurs et des lecteurs, qui peuvent ainsi disposer de trois traductions du recueil. Chaque traduction de valeur (ce qui est le cas) non seulement contribue à mieux faire connaître l’œuvre, mais l’enrichit de résonances nouvelles.

    Mon intention n’est pas de les comparer, ces traductions (ni évidemment de les hiérarchiser). On aura vu les variations du titre (Philippe Loubière). Un simple aperçu des trois premiers vers du premier poème (« Către cititori », « Aux lecteurs ») suffira à mesurer combien la traduction de la poésie, d’une manière générale, est affaire non seulement de compétence linguistique, mais aussi de sensibilité personnelle.

    Paul Miclău : C’est ici ma maison. Là le soleil, le jardin et ses ruches.

                       Vous passez sur la route, regardez par la grille de la porte

                       et attendez que je parle. – Mais par où commencer ?

    Philippe Loubière :  Ma maison est ici. Derrière

                                          Est le soleil et le jardin avec ses ruches.

                                Vous qui passez sur le chemin,

                                          Vous voyez à travers les barreaux du portail

                                Et guettez mes propos. Par où commencerais-je ?

    Jean Poncet : Ici est ma maison. Là le soleil et le jardin avec ses ruches.

                       Vous qui passez sur la route, vous regardez par la grille du portail,

                       Attendant que je parle. – Par où commencer ?

    À chacun de se faire son idée.

    Par où poursuivre ? Par le volume qui nous occupe principalement dans cette chronique. Dans son avant-propos, Jean Poncet insiste sur le sens du titre et sur la substance du recueil, que ce titre synthétise : le « grand passage » est celui qui mène vers la mort, et dans sa postface, Horia Bădescu évoque ce qui est pour lui le thème central : « la tentation du silence et la sémantique de l’absence ». Face au monde, se taire et disparaître. Poncet et Bădescu, tous deux poètes, perçoivent profondément ce qui est au cœur des vers de Blaga : le pessimisme, qui transforme les prières en mots « amers », l’espérance en aspiration vers le vide. Mais ce pessimisme n’est pas absolu. Si les textes sacrés sont revisités, c’est au profit d’images nouvelles, d’une osmose entre le « je » et la nature :

                                Seul mon sang brame dans les bois

                                à son enfance lointaine

                                tel un cerf fatigué

                                à sa biche perdue dans la mort.

    Et « le mot se fait acte », chantant et bâtissant toujours le village cher au poète (« En vérité l’éternité est née dans le village ») et redisant le goût de la vie simple, dans une présence au monde qui met la contemplation et l’art au-dessus de l’action (« Je danse au-dessus de l’action »).

    Les recueils de Lucian Blaga se suivent sans se ressembler, dans une évolution qui frise la contradiction. Mais une contradiction qui se résout dans une perspective constructive : le cheminement vers la mort, le désir de silence et d’invisibilité ne peuvent passer que par un « être au monde » lyrique et créateur.

    Jean-Pierre Longre

    www.jacques-andre-editeur.eu

    http://scoalaardeleanacluj.ro/wp

    L. Blaga, Au fil du grand parcours.pdf

  • Panaït Istrati à Lyon

    SAISON FRANCE-ROUMANIE 2019
    à suivre par ce lien :
    saisonfranceroumanie.com/le-calendrier/

    Bibliothèque Municipale de Lyon La Part-Dieu
    Rencontre avec Golo
    Vendredi 18 janvier 2019
    18h30-20h15

    www.bm-lyon.fr/

     

    Librairie Expérience Lyon
    Rencontre avec Simon Géliot et Golo
    Samedi 19 janvier 2019
    14h30

    ​​
    www.librairie-experience.com/Deux-auteurs-sur-le-meme-theme-.html

     

    Musée de l’imprimerie et de la communication graphique de Lyon
    Rencontre autour de Codine avec
    Alain Dugrand et Simon Géliot
    Dimanche 20 janvier 2019
    14h-17h30

    infos.imprimerie.lyon.fr/Le canard électronique janvier 2019
    &
    Exposition Panaït Istrati
    16 novembre 2018 - 24 février 2019

    Du 16 novembre 2018 au 24 février 2019 le Petit Salon du Musée de l’imprimerie et de la communication graphique de Lyon célèbre Panaït Istrati en exposant des éditions illustrées de ses œuvres autour de Kir Nicolas suivi de Codine publié en 1926 par les éditions du Sablier
    ​que dirigeait René Arcos.
    Enrichie de bois en couleurs de Charles Picart Le Doux cette belle édition a été réalisée par le maître imprimeur lyonnais Marius Audin (1872-1951) dans son imrimerie des Deux-Collines. Marius Audin, qui fut un des principaux historiens français des arts et métiers graphiques de la première moitié du XXe siècle, est le père de Maurice Audin, créateur du musée de l’Imprimerie et d’Amable Audin, créateur du musée archéologique de Lyon. 
    Aussi l’œuvre de Panaït Istrati ne pouvait trouver, naturellement en quelque sorte, plus bel écrin que le Musée de l’imprimerie et de la communication graphique de Lyon pour y être accueillie. Nous en remerçions son directeur, Joseph Belletante, et toute l’équipe du musée qui nous ont guidé tout au long de la mise en œuvre de ce projet.
    infos.imprimerie.lyon.fr

    Rencontres, Exposition, Panaït Istrati

     

    http://livresrhoneroumanie.hautetfort.com/apps/search?s=Pana%C3%AFt+Istrati&search-submit-box-search-236757=OK 

  • Mémoire et « moments forts »

    Récits, francophone, Roumanie, Cornelia Petrescu, Edilivre, Jean-Pierre LongreCornelia Petrescu, L’Écho de la lumière, Edilivre, 2018

    Les six textes en prose de ce nouveau livre de Cornelia Petrescu (qui a publié plusieurs ouvrages en roumain et en français) révèlent des souvenirs personnels ou collectifs filtrés et poétisés par la mémoire. Si le premier, qui donne son titre au recueil, est un « texte imaginaire » symbolisant la remontée à la source et composé de visions oniriques et fantastiques, les suivants sont fondés sur des « faits réels » entrant dans l’histoire individuelle, de soi ou des autres.

    Les récits sont liés au passé récent de la Roumanie, alors que le pays et ses habitants tentaient de vivre sous le joug de la dictature. On suit les malheurs de cette vieille dame dont la chèvre a commis un sacrilège politique, ce qui a valu à sa propriétaire 18 ans de prison pour « profanation de la direction du Parti »… Le grotesque et le dramatique se confondent… Il y a aussi le sort tragique de ces étudiants de Timişoara « qui ont défilé pour apporter leur soutien à la Perestroïka de Gorbatchev [et qui] ont été exécutés en prison. ». Ou encore les retombées de la catastrophe de Tchernobyl que les lois de la « Securitate » n’ont rien fait pour arranger.

    À côté de cela, de fraîches questions enfantines (par exemple sur les secrets que renferme le cocon du ver à soie) et les belles descriptions de paysages, comme ceux de la Dobrogea en fleurs. Et si l’on sent bien que la langue utilisée par l’auteure n’est pas sa langue maternelle, la « roumanité » de son propos, dans la forme et dans le fond, n’est pas étrangère à la poésie de ces récits tragiques.

    Jean-Pierre Longre

    www.edilivre.com

    www.cornelia-petrescu.info